Objectif neutralité carbone : quelle stratégie pour la R&D ?
Pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré et éviter des dérèglements environnementaux majeurs, il est impératif d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Calculé par le GIEC dans la foulée des Accords de Paris (2015), cet objectif a été intégré par la loi énergie-climat effective depuis 2019. Le 7 mai dernier, le Groupe EDF a modifié ses statuts pour faire de la neutralité carbone officiellement un élément clé de sa raison d’être. Sur ce sujet, EDF peut d’ailleurs compter sur l’expérience de sa R&D, déjà engagée depuis de nombreuses années dans l’élaboration de solutions pour un monde entièrement décarboné.
Assistons-nous à un changement de paradigme ? Avant les Accords de Paris sur le climat en 2015, la France avait pour ambition, en vertu du Protocole de Kyoto, de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050. L’objectif vient donc de passer à zéro émission nette. Cela ne veut pas dire pour autant plus du tout d’émissions. Il faudra les réduire au strict minimum, tout en s’assurant que celles que l’on ne peut pas éviter soient compensées, mais les compensations possibles sont très limitées.
C’est une nouvelle ère qui se traduit déjà par des mesures concrètes : « Quand on annonce qu’aucune émission nette ne sera autorisée, alors il n’y a plus de perspective échappatoire pour les entreprises, les particuliers ou les territoires, ni de tentative de passer entre les mailles du filet. Par exemple, dès 2040, aucune voiture à moteur thermique ne pourra plus être vendue en France. Et tous les secteurs seront concernés par des restrictions radicales, qu’il faut préparer dès maintenant. Trente ans pour atteindre la neutralité carbone, c’est une durée qui peut paraître longue à l’échelle individuelle, mais c’est le temps que prennent classiquement les nouvelles technologies pour se diffuser complètement, comme, par exemple, le passage de la télévision noir et blanc à la couleur. », anticipe Stéphane Dupré la Tour, directeur Innovation Avancée et Technologies numériques de la R&D d’EDF.
Nous allons entrer dans un rythme de changement inédit dans l’histoire de l’énergie et dans l’histoire de l’humanité.
Déployer des innovations...
Œuvrer à la neutralité carbone figure dans l’ADN de la R&D d’EDF. Pourquoi ? Tout d’abord parce qu’en appui au Groupe, elle ne cesse de mettre au point des solutions pour optimiser les moyens de production d’électricité ne nécessitant pas d’énergies fossiles, telles que les centrales hydroélectriques, les éoliennes, les fermes photovoltaïques, et le nucléaire. Les équipes de chercheurs s’attellent également à l’électrification des usages. Car électrifier reste à ce jour le moyen le plus efficace de décarboner la société sous réserve que la production d’électricité soit elle-même bas carbone, ce qui est le cas en France.
Des technologies telles que les voitures électriques sont désormais matures et, selon Stéphane Dupré La Tour, il devient essentiel de les mettre à grande échelle sur le marché : « Nous n’avons plus le temps d’attendre une nouvelle technologie de batterie pour commencer à déployer les voitures électriques. Si on prend l’exemple des chaudières à gaz ou au fuel et qu’on constate que leur durée de vie est d’environ 20 ans, on comprend l’importance d’agir maintenant pour tenir nos engagements à l’horizon 2050. » Rendre encore plus pertinentes les pompes à chaleur ou les infrastructures de recharges électriques... Voici le type de travaux sur lesquels travaillent les experts de la R&D.
Pour suivre la cadence, les équipes devront redoubler d’efforts. D’autant qu’une électrification rapide de la société nécessitera des réseaux électriques non seulement plus robustes et résilients mais aussi plus flexibles : « L’électricité deviendra progressivement la source principale sinon unique d’énergie, avec la disparition du pétrole, du gaz méthane et du charbon. Il va donc y avoir une plus grande demande mais aussi plus d’attentes vis-à-vis du réseau. Nous continuerons donc à développer des objets électriques intelligents. Ce surcroit d’intelligence permettra d’optimiser les consommations. Chaque objet comme votre cafetière ou votre voiture sera en mesure de réagir à son environnement et de s’éteindre quand le réseau sera beaucoup sollicité ! Le consommateur, lui, pourra bénéficier de fonctions supplémentaires et c’est un point essentiel pour assurer l’acceptabilité de ces nouveaux usages de l’électricité et obtenir une modification des comportements. D’ores et déjà dans les nouvelles voitures électriques, vous avez des applications qui vous permettent, à l’arrêt, de jouer, de garder le véhicule frais, de surveiller son environnement. Avec les nouvelles générations de batteries, vous pouvez continuer à alimenter un ordinateur, les caméras, garder la climatisation sans que le moteur tourne. Quand vous avez un réservoir de pétrole, vous ne pouvez rien en tirer, sinon rouler. Couplée au numérique, l’électricité, elle, pourra donc enrichir fonctionnellement nos objets », poursuit Stéphane Dupré la Tour.
… et oser le futur
Certaines technologies, telles que l’hydrogène décarboné car produit à partir d’eau et d’électricité bas carbone, fonctionnent mais restent encore coûteuses et délicates à déployer. La R&D travaille activement à leurs « mises à l’échelle » pour qu’elles soient donc pleinement opérationnelles et disponibles sur le marché. « Outre l’hydrogène, pour l’électrification des poids lourds, il y a aussi les batteries. Il n’existe pour l’instant aucun constructeur qui vende des 38 tonnes propulsés à l’électricité. Mais il y a déjà des démonstrateurs et des tests sur le terrain. Et nous devons nous y préparer ! Nous avons enfin des sujets plus longs termes à défricher comme celui du captage du CO2 ou de l’aéronautique décarbonée. Comment mettre des batteries massives dans des long-courriers ? Personne ne sait faire et il est primordial d’y consacrer des recherches. Il y a aussi la piste du biofuel et des carburants synthétiques avec apport électrique » s’enthousiasme Stéphane Dupré la Tour.
Pour la R&D d’EDF, préparer 2050 consiste donc à lever ces derniers verrous technologiques, mais aussi à s’emparer du champ fondamental que sont les sciences sociales : « Qui dit vitesse de changement inédite implique que nous devons avoir une compréhension très fine des éventuels obstacles. Pourquoi les consommateurs ne veulent-ils pas changer leurs chaudières par exemple ? L’imposer par en haut peut provoquer des réactions violentes et des instabilités sociales. Nous devons impérativement travailler sur l’acceptabilité et créer de la confiance. Je suis conscient des grands défis qui nous attendent. Il faudra bien entendu une volonté politique de tenir le cap de la neutralité carbone en 2050, mais aussi d’obtenir une relocalisation industrielle. Si les batteries des voitures électriques sont toutes importées, cela créera un problème. De même pour les matériaux nécessaires à la transition. Mais je suis optimiste pour l’avenir car je vois des solutions et nous y travaillons ! » conclut Stéphane Dupré la Tour. Trente ans, le compteur est déjà lancé et R&D est prête à relever le challenge.
La neutralité carbone, qu'est-ce que c'est ?
Atteindre la neutralité carbone, pour le groupe EDF, consiste à réduire au minimum les émissions de gaz à effet de serre de l’ensemble de ses activités de production d’électricité et d’exploitation de ses moyens de production. Mais pas uniquement car EDF a inscrit dans sa raison d’être l’objectif de compenser les émissions de CO2 qui seraient résiduelles.
D’autre part, EDF envisage également une électrification étendue des usages pour se substituer à l’utilisation d’énergies fossiles, comme le pétrole, le gaz méthane, le charbon et la lignite. L’électricité et l’hydrogène très bas carbone peuvent remplacer ces énergies fossiles fortement émettrices de CO2.
Quels axes de recherche pour la R&D d’EDF, en appui du Groupe, au sujet de la neutralité carbone ?
1 – Les travaux de recherche pour un mix énergétique très bas carbone et le plus performant possible, notamment sur :
- La flexibilité et la complémentarité des différents moyens de production qui composent le mix électrique ;
- L’analyse du cycle de vie de chaque filière de production d’électricité et d’hydrogène dans le but de mieux connaître les émissions de gaz à effet de serre directes et indirectes et de les diminuer au maximum.
2 – Les travaux de R&D concernant l’électrification des usages afin de substituer des énergies fortement émettrices de CO2 par une électricité très bas carbone ou de l’hydrogène produit à partir d’électricité très bas carbone :
- Aide au déploiement à plus grand échelle et l’amélioration des usages électriques déjà existants ;
- Proposition de développements technologiques innovants dans les secteurs où les usages électriques n’existent pas encore ;
- Travaux sur l’accessibilité à l’électricité et l’acceptabilité de ses usages.
3 – La recherche dans le domaine du traitement des émissions de CO2 résiduelles qui ne sont pas « évitables » :
- Captage et stockage de CO2, puits de carbone ;
- Compensation par la nature ;
- Valorisation de ces émissions, notamment par réutilisation.
Les enjeux de développement durable et de R&D
Carine de Boissezon, Directrice du Développement Durable chez EDF, revient en vidéo sur la volonté du Groupe de devenir neutre en carbone à l’horizon 2050 et met en avant l’apport de la R&D sur ce sujet ainsi que sur les enjeux de biodiversité.
Votre navigateur ne prend pas en compte le javascript.
Pour vous permettre d'accéder à l'information, nous vous proposons de consulter la vidéo dans un nouvel onglet.