Mieux mailler la ville et rapprocher les fonctions sociales pour améliorer la qualité de vie tout en encourageant les usages écologiques : c’est l’approche défendue par Carlos Moreno, directeur scientifique de la chaire Entrepreneuriat, territoire et innovation (ETI) à l’institut d’administration des entreprises (université Panthéon-Sorbonne).
Vous êtes le promoteur de « La ville du quart d’heure ».
De quoi s’agit-il ?
Carlos Moreno - La ville du quart d’heure, c’est celle où l’on trouve, à moins de quinze minutes de chez soi, les fonctions essentielles : travailler, se ravitailler, se soigner, apprendre et pratiquer des loisirs. Pour les habitants, le bénéfice le plus évident est de disposer d’un temps supplémentaire utilisable pour soi et pour les siens. S’ajoute, dans la logique de la transition énergétique, une contribution à l’émergence de la ville plus durable puisque la diminution des distances favorise le recours aux mobilités douces.
Je précise que cette approche peut s’appliquer aux villes de moyenne ou basse densité. L’étalement urbain incite, alors, à parler de territoire de la demi-heure.
Comment avez-vous théorisé ce concept ?
Carlos Moreno - J’ai combiné différentes approches dont, notamment, le chrono-urbanisme, qui est une discipline visant à définir les conditions d’une meilleure utilisation du temps dans la ville. Il s’agit d’aller non plus vers l’aménagement de la ville mais vers l’aménagement de la vie urbaine. Le point essentiel est de réfléchir à plusieurs usages pour une même infrastructure. Un centre sportif accueillant des activités de soutien scolaire; un atelier de réparation d’objets implanté dans un commerce de proximité ; une discothèque transformée en salle de sport pendant la journée…
Autant de pistes pour créer différents centres multiservices au cœur de la ville !
Que manque-t-il aujourd’hui pour faire advenir la ville du quart d’heure ?
Carlos Moreno - Le changement dépend en premier lieu des gouvernances locales, qui doivent s’approprier cette idée et donner l’impulsion. Certaines l’ont déjà fait. Je pense à Nantes qui, dans le cadre du réaménagement de l’Île de Nantes, déploie un urbanisme attentif à la notion de mixité fonctionnelle. Aujourd’hui, la ville du quart d’heure est une réalité dans le quartier Prairie-au-Duc.
En Île-de-France, le projet Portes de Paris a été lancé dans le cadre de la chaire ETI que je dirige et dont le groupe EDF est partenaire. Il vise à formuler des hypothèses de transformation urbaine et territoriale afin d’inspirer les décideurs publics.