Retrouver son état – physique ou psychologique- à la suite d’un choc : c’est la définition la plus commune de la résilience. Depuis une dizaine d’années, cependant, cette notion est pensée non plus seulement dans une dimension individuelle mais aussi collective. À l’échelle d’un territoire, par exemple, elle consiste à anticiper les perturbations de toute nature (sanitaire, écologique, sociale) pour en minimiser les impacts. Et, une fois le choc passé, à rebondir en préservant ce qui est considéré comme fondamental et en engageant une part de transformation positive là où elle est nécessaire.
« Parce qu’elle se nourrit de la nature, des ressources et de la structure propres à chaque territoire, la résilience doit toujours faire l’objet d’une approche sur mesure, explique Clara Villar, coordinatrice de la convention alpine et de la Suera (Stratégie de l’Union européenne pour la région alpine) et facilitatrice en intelligence collective. Et cela d’autant plus qu’elle est au service de l’intérêt général, et dépend donc du projet politique porté par les décideurs publics. »
Faire tomber les barrières
Sur quels leviers une politique de résilience peut-elle s’appuyer ? Les territoires disposent tout d’abord d’outils de préparation et de gestion de crise. En France, les tempêtes de l’hiver 1999 puis l’explosion de l’usine AZF en 2001 ont conduit l’État à mettre en place un arsenal législatif et réglementaire étoffé.
Plan de sauvegarde pour les communes, plan d’organisation interne et plan de continuité d’activité pour les entreprises, plan de mise en sûreté des personnes et des biens pour les établissements scolaires… autant de garanties apportées à la mise en place de moyens humains et matériels adaptés.
« Ces outils sont capitaux dans l’anticipation des accidents majeurs. Mais pour donner leur pleine mesure, ils doivent être élaborés conjointement. Il faut aussi s’assurer de leur cohérence avec la réponse en termes de sécurité civile, dont l’élaboration dépend du préfet, le représentant local de l’État », précise Jacques Faye, responsable du bureau de l’information préventive à la direction prévention des risques du ministère de l’Environnement (de 1998 à 2018). Se dessine ici une condition clé de réussite. Pour qu’un territoire soit résilient, les acteurs – intercommunalité, métropole, département, région, établissements publics… – doivent coopérer et aligner leurs décisions. En la matière, il peut être pertinent d’ignorer les frontières. « C’est ce que fait l’Europe pour lutter contre les feux de forêt sur le pourtour méditerranéen, remarque Jacques Faye. L’action du Centre de coordination de la réaction d’urgence basé à Bruxelles permet de mutualiser les moyens aériens à l’échelle supranationale. »
Durant la crise liée à l’épidémie de Covid-19, cette question de l’articulation des politiques engagées par les États a été régulièrement évoquée. Les institutions européennes, en lien avec les pays membres, ont formalisé plusieurs réponses communautaires. La création d’une réserve stratégique de matériel médical en donne une bonne illustration.
Penser les futurs possibles
Décisif dans la gestion des catastrophes, le décloisonnement des acteurs et des niveaux d’intervention l’est aussi pour penser les futurs possibles des territoires. L’enjeu : faire face aux phénomènes profonds et de longue durée tels que le dérèglement climatique. « Il faut oser agir, de façon sectorielle et surtout systémique, sur les problématiques que les crises ont contribué à révéler, souligne Clara Villar. L’objectif est de transformer des collectifs créés sous la contrainte et la peur en collectifs mus par le sens. »
Depuis quelques années, Paris travaille à établir des traits d’union entre ses enjeux propres et ceux de ses environs, en proposant des réponses transversales. La ville collabore ainsi avec les territoires ruraux en vue de renforcer le rôle de la Seine comme voie d’acheminement pour les produits agricoles, mais aussi comme moyen de régulation des crues. Une réflexion a notamment été menée avec la Métropole du Grand Paris et les chambres d’agriculture. Elle a conduit à la recréation de zones d’expansion des crues et à la mise en place de garanties d’indemnisation en cas d’inondation.
À terme, ce type d’accord gagnant-gagnant pourrait inclure des débouchés pour les exploitants agricoles (dans le cadre de l’approvisionnement des cantines scolaires, par exemple). En contrepartie, les bénéficiaires s’engageraient à supprimer les pesticides dans les cultures. « Voilà pourquoi s’impose aujourd’hui l’enjeu d’une gouvernance innovante : il ne s’agit plus simplement de gérer ou d’administrer mais de concilier les besoins des différents acteurs du territoire », analyse Clara Villar.
Accompagner les territoires pour décarboner les usages et préparer l’avenir
Aux yeux du groupe EDF, la recette pour faire de l’énergie un levier de résilience et réussir la transition énergétique porte un nom : neutralité carbone. « C’est en systématisant cette logique dans nos villes, nos quartiers et nos projets, que nous répondrons au choc du dérèglement climatique et ouvrirons la voie à un avenir soutenable pour les territoires, explique Jean-Pierre Frémont, directeur à l’Action Régionale du groupe EDF. Pour y parvenir, il faut aborder la question énergétique dans toutes ses finalités pour le bâtiment, l’industrie, les transports et les activités économiques. » De l’écogeste appris sur les bancs de l’école au grand projet d’aménagement urbain, de multiples exemples illustrent cette recherche de neutralité carbone. Les transports en commun sont, notamment, au cœur de la problématique. Récemment, le Grand Avignon a demandé au Groupe de travailler sur un scénario d’électrification de sa flotte de bus. La Bourgogne-Franche-Comté, pour sa part, souhaiterait faire rouler ses cars, bus et bennes à ordures ménagères avec de l’hydrogène issu du territoire…
Quel rôle pour le groupe EDF ?
Considérer les territoires comme des organismes où les flux de personnes, de matière et d’énergie constituent un ensemble indissociable, c’est reconnaître un rôle majeur aux acteurs qui fournissent les ressources indispensables. Le groupe EDF est l’un d’entre eux. Cela tient pour partie à une de ses activités : celle de gestionnaire de réseau, qui le met en première ligne dans la prévention du risque de black-out en cas de crise. Différents projets sont déjà menés en vue d’améliorer les dispositifs existants. En témoigne, notamment, le choix d’enterrer les postes de distribution d’électricité de La Rochelle avec un dispositif technique adéquat pour leur permettre de continuer à fonctionner dans un contexte de submersion.
Du fait de la densité de son ancrage local, le groupe EDF est en mesure de se mobiliser pour faire face aux situations exceptionnelles. Ainsi, lors de la crise de la Covid-19, le Groupe a coanimé un réseau d’industriels du Centre-Val-de-Loire. Sa mission ? Garantir l’accès de tous les participants aux services et ressources nécessaires à la continuité de leur activité.
La contribution du Groupe à la résilience des territoires s’incarne, enfin, dans son expertise technique au service des projets de smart city, à l’image du centre de supervision urbaine(1) lancé en 2019 par la Métropole de Dijon (OnDijon). Cette plateforme de commandement réunit les principales fonctions de la ville : police municipale, sécurité, circulation, e-administration, transports en commun… Y convergent, en temps réel, les informations concernant l’ensemble des services, les images des 300 caméras de vidéosurveillance de la Métropole, ainsi que les données collectées via les capteurs installés sur les équipements urbains (feux tricolores, bornes électriques, éclairage public, etc.). De quoi faciliter l’anticipation et la coordination des travaux impactant l’espace public, le traitement des ordures ménagères ou encore la gestion du risque de crue. OnDijon s’est également révélé précieux pour faire face à la crise de la Covid-19. Grâce à une capacité de coordination et de partage de l’information renforcée, le fonctionnement de la Métropole n’a pas été affecté pendant la période la plus critique… même avec moins d’agents sur le terrain !
(1) Réalisé par le groupement composé de Bouygues Énergies & Services et Citelum, avec SUEZ.
Cet article est extrait du premier magazine Energie des territoires (Télécharger le magazine).