Le chargement du premier assemblage combustible dans la cuve du réacteur a marqué le début des essais de démarrage de l’EPR de Flamanville. La première des quatre phases s’est achevée fin mai, la seconde phase a débuté avec la montée en pression et en température des circuits et les essais précritiques à froid (EPAF). Celle-ci prendra fin avec les essais précritiques à chaud aux conditions d’arrêt à chaud et les opérations de préparation à la divergence dans les prochaines semaines.
La phase de démarrage couvre le chargement du combustible dans la cuve du réacteur, la divergence, le couplage au réseau lorsque le réacteur sera à 25% de puissance, et toute la montée en puissance jusqu’à la fin du programme d’essais à 100% de puissance nucléaire (PN), un programme d’essais spécifique doit être déroulé. Cette séquence qui va durer plusieurs mois est découpée en 4 phases.
Chaque procédure précise les conditions d’engagement de la phase d’essais de démarrage, l’enchaînement des essais et l’objectif des essais. Près de 200 PEE (procédures d’exécution d’essais) seront réalisées et permettront de tester environ 1500 critères de sûreté.
Le chargement du premier assemblage combustible dans la cuve du réacteur, le 8 mai 2024, a marqué le début de la première phase des essais de démarrage de l’EPR de Flamanville.
Cette étape minutieuse a été répétée avec succès 241 fois sous eau, par le tube transfert qui fait le lien entre la piscine d’entreposage du combustible et la piscine du réacteur où se situe la cuve, durant plusieurs jours. Chaque assemblage mesure environ 5 mètres de haut et pèse près de 800kg. Pendant toute la phase de manutention du combustible, les taux de comptage, la concentration en bore ainsi que les niveaux dans les compartiments des piscines réacteur et combustible ont été surveillés pour garantir la sûreté des opérations. En parallèle, une cartographie du cœur a été réalisée afin de vérifier sa conformité avec le plan de chargement.
Revivez les opérations de chargement du combustible raconté par Fabien CUDELOU, chef du premier chargement, à travers la vidéo ci-dessous :
Ensuite, les internes supérieurs de cuve accueillant les mécanismes de commande de grappes et l’instrumentation du cœur, des tubes très fins de 12,3mm, ont été insérés dans la cuve à l’aide d’outillages spécifiques. La piscine du bâtiment réacteur a été vidangée, afin de poser le couvercle de la cuve de 5,7 mètres de diamètre et 145 tonnes. Des activités permettant de garantir son étanchéité ont eu lieu, à l’instar de la passivation du plan de joint de la cuve.
Fin mai, les 52 goujons du couvercle ont été serrés à l’aide de la machine de serrage et de desserrage des goujons (MSDG), une opération rigoureuse de plusieurs heures qui a mobilisé une vingtaine de personnes de Framatome.
La « passerelle à câbles » a été ensuite installée afin de connecter le système de contrôle du cœur (contrôle commande) et l’instrumentation insérée dans le cœur. Des contrôles ont été faits afin de garantir l’étanchéité des connexions mécaniques. D’autre part, la sortie de conservation des générateurs de vapeur a aussi été engagée pour les mettre en configuration pour l’exploitation. Ces étapes marquent la fin de la première phase des 4 phases d’essais de démarrage de l’EPR de Flamanville.
Ensuite, le niveau d’eau dans le circuit primaire a été abaissé au niveau « ¾ de boucle ». La seconde phase des essais de démarrage a ainsi pu débuter avec les essais précritiques à froid à 55°C, avec la mise sous vide du circuit primaire, puis le remplissage des épingles des générateurs de vapeur, de la cuve et du pressuriseur. Les équipes ont procédé à l’éventage dynamique du circuit primaire en démarrant les quatre groupes motopompes primaires (GMPP) à 24,5 bars pour la première fois depuis le chargement. En effet, l’eau mise en mouvement permet de chasser l’air du circuit et évite ainsi son accumulation dans les points hauts du circuit, tels que la cuve ou le pressuriseur. Après vérification de l’absence d’air résiduel dans le circuit, la pression a été remontée à 26,5 bars et les quatre GMPP ont été mises en service définitivement.
En parallèle, l’instrumentation cœur (RIC) a aussi été testée et mise en service. C’est un système qui permet de mesurer de façon précise la répartition de la puissance dans le réacteur. Dans ce système, on trouve 2 parties :
- Des lances d’instrumentation qui permettent de mesurer les températures de sortie de cœur, le niveau d’eau dans la cuve et le flux neutronique en temps réel.
- Les « aeroballs* » qui permettent de réaliser des cartes de flux neutronique précises.
Les essais de fonctionnement des 89 grappes de commande (RGL) ont été également menés à froid. Trois ensembles ont été testés : les mécanismes de commande de grappe, les disjoncteurs associés et les indicateurs de position des grappes. Durant une séquence d’une semaine, les grappes de commande ont été extraites une à une du cœur pour vérifier leur fonctionnement. Un essai du temps de chute des grappes a également été réalisé à froid, afin de garantir le bon fonctionnement des actions attendues lors d’un arrêt automatique du réacteur, afin de garantir la maitrise de la réactivité.
Enfin, le débit des GMPP a été mesuré, afin de contrôler le débit d’eau qui passe par le cœur du réacteur. Ces essais marquent la fin des essais précritiques à froid (EPAF). Le GO pour la montée en pression et en température du circuit primaire jusqu’au palier à d’arrêt à chaud (304°C et 155 bars) a été donné le jeudi 20 juin. La « bulle au pressuriseur » a été formée, permettant de passer d’un état monophasique à un état diphasique dans le pressuriseur (l’eau du pressuriseur est chauffée, à l’aide des chaufferettes, afin de se placer sur la courbe de saturation de l’eau à 26 bars). Pour rappel, le pressuriseur est un élément du circuit primaire qui permet de conserver l’eau à l’état liquide lorsque le circuit primaire est à 304°C (température du palier dit « arrêt à chaud) et 155 bars. À l’intérieur du circuit primaire, la pression est donc maintenue à 155 bars grâce au pressuriseur.
Dès 120°C, le refroidissement du circuit primaire est assuré par les générateurs de vapeur. Plusieurs essais seront réalisés durant la montée en température et en pression, dont les essais dits « TUY », où toutes les tuyauteries seront contrôlées afin de mesurer leur déplacement et les jeux mécaniques. La régulation de l’alimentation en eau des générateurs de vapeurs sera également vérifiée.
Le palier d’arrêt à chaud a été atteint ces derniers jour, les essais précritiques à chaud (EPAC) ont ainsi pu débuter. De nombreuses séquences d’essais réalisées durant les EPAF seront de nouveaux appliquées durant les EPAC, étant donné que les conditions de température et de pression seront aux conditions de fonctionnement normales : essais TUY, essais de fonctionnement des grappes de commandes, etc.
Des essais marquants seront également réalisés tels que le refroidissement du réacteur via le système de décharge à l’atmosphère (VDA) à une vitesse de 50°C/heure jusqu’à 135°C et 26,5 bars, ou encore deux essais soumis à une demande de modification temporaire (DMT) des règles générales d’exploitation (RGE) : le réglage d’aspersion principal au pressuriseur et la perte des 4 GMPP.
Les EPAC, ainsi que la phase DEM32, prendront fin avec les opérations de préparation à la divergence et la demande d’autorisation à l’ASN de diverger, au mois de juillet.
Cette première divergence du réacteur EPR de Flamanville devrait intervenir prochainement, et le couplage durant l’été.
*L’AMS (aeroball mesurement system) est un système de cartographie du flux neutronique dans le cœur spécifique à la technologie Konvoi. Le principe est d’envoyer des billes dans le cœur via des tubes d’instrumentation, celles-ci restent un temps dans le cœur et s’activent avec le flux neutronique. Une fois éjectées avec de l’azote par d’autres tubes, ces billes sont mises sur une table de mesure afin de connaitre le flux neutronique interne.